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Lettre ouverte adressée à Monsieur Baudouin SCHOENMAEKERS, Président du Comité pour l'Information de l'A.I.S.S. Directeur général de l'ANPAT. (Association Internationale de Sécurité Sociale) Case Postale 1 - CH 1211 GENEVE 22
Calisto PERETTI Rue de l'Aire, 7 B 7480 HORRUES
Horrues, le 7 juillet 1986
Monsieur le Président du Comité pour l'Information,
Revenant à « l'Exposition internationale et au Colloque international sur le rôle et l'impact de l'affiche de sécurité », je tiens à vous féliciter, ainsi que vos collaborateurs, pour l'organisation et la parfaite synchronisation des opérations qui se sont déroulées trois jours durant au Centre Albert Borschette. Néanmoins, étant à l'origine du projet au temps où je dirigeais le service de Créations graphiques a l'ANPAT, je me permets d'émettre quelques remarques quant aux distances prises vis-à-vis de l'idée de base de cette manifestation. Profitant de cette occasion unique que procurait ce colloque, il est regrettable que: 1 ° Un réel dialogue entre les graphistes et toutes les parties intéressées n'ait pas eu lieu a cause, d'une part, du cloisonnement des carrefours et, d'autre part, du temps de parole insignifiant donné aux graphistes de la prévention en séance plénière (quelques minutes lors des conclusions générales du colloque le dernier jour). Un véritable débat programmé plus longuement aurait permis, une fois pour toutes, d'informer de façon exhaustive en crevant l'abcès du sempiternel problème de la création paralysée par les dogmatismes. Conséquemment, la confrontation inédite des conceptions plastiques, philosophiques et psychologiques de chacun - notamment la positivité et la négativité de l'image, d'ailleurs mises en question, avec insistance par l'orateur socialiste du colloque - eut été salutaire pour l'efficacité du message graphique. 2° Pour sélectionner et présenter les affiches le 1er jour du colloque, un choix unilatéral se soit porté sur les professionnels de la publicité. Ceux-ci, bien que hautement spécialisés en leur domaine, émirent malheureusement des commentaires très orientés faisant l'apologie d'images non pluralistes, d'une plasticité proche du pictogramme a l'opposé d'une vision plastique humaniste et expressive, alors que des affichistes professionnels spécialistes du langage graphique de prévention - oui, ils existent et étaient en mesure, vu leur vécu sur le terrain, de leur donner la réplique, fournissant ainsi une véritable dimension pédagogique au colloque, ce a quoi les congressistes étaient en droit de s'attendre. 3° Lors de la présentation commentée par les publicitaires le 1er jour, la modestie de l'ANPAT se soit manifestée au point de ne montrer en exemple aucune de ses affiches qui, nonobstant, ont fait autorité. Tant sur plan national que sur le plan international, elles furent souvent reproduites dans les revues de prévention, primées, présentes dans des expositions et musées étrangers et de nombreuses fois plagiées. 4° La distinction n'ait pas été faite entre la vision pragmatique des artistes-créateurs spécialisés dans le langage graphique de la prévention, celle des artistes-créateurs en publicité et celle de metteurs au net de tous poils. Je voudrais souligner que, contrairement à ce qu'affirment les publicitaires dans leurs très instructives leçons de« marketing» au bénéfice du« business », la sécurité, elle, ne se commerce pas puisqu'il s'agit, en ce qui nous préoccupe, de la santé et de la vie des travailleurs. Le langage graphique de la prévention, qui n'est pas toujours en clin d'oeil si nous le voulons efficace, doit se concevoir dans une éthique de respect envers le destinataire. Et s'il faut parler« gros sous» comme appât pour pouvoir déployer des actes de prévention en matière graphique, je reprendrai le raisonnement on ne peut plus logique d'un des orateurs du colloque, chef du service de prévention d'une assurance: « le cout de la création d'une affiche est dérisoire face aux sommes souvent considérables pour réparer les conséquences d'un accident». Adaptée, originale et bien conçue plastiquement, l'affiche se paie d'elle-même et rapporte donc beaucoup plus qu'elle ne coute !
Je termine en remémorant que j'ai toujours prétendu a une indépendance intellectuelle vis-à-vis des modes et des poncifs en combattant le laxisme de l'image. Mes 27 années consacrées à la création d'affiches pour la prévention des accidents du travail m'ont donné une expérience en la matière qui m'inspire, après Colloque, les réflexions que je viens d'exprimer. Pour refléter objectivement toutes les facettes de la question, je pense qu'il serait souhaitable de porter cette contribution à la connaissance des participants dans les actes du Colloque.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments dévoués.
Calisto PERETTI Ex Directeur Artistique de l'ANPAT
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